Florent Justine Joseph
oil on canvas
142,5 X 100 cm
159,5 x 117,5 cm
r. u. "L. Frederic 1885"
above left "Florent Justine Joseph"
Exposition de l'Essor, Brussels 1887 N° 3 page II
licentiaatsthesis Isolde De Buck RUG Gent 1995
Historique :
Collection L. Dufour, Bruxelles.
Collection particulière, Anvers.
Galerie Patrick Derom, Bruxelles.
Collection De Groeve, Belgique.
Exposition :
1886, XIIIe Salon du Cercle artistique, Bruxelles.
1887, XIe Exposition de l’Essor, Bruxelles, n° 106, sous le titre Trois Enfants d’ouvrier.
2018, Léon Frederic (1856-1940), un autre réalisme, musée Courbet, Ornans, n°38, sous le titre Trois
Enfants d’ouvriers ou Florent, Justine, Joseph.
Source :
L’Art moderne, avril 1886, p. 132 ; La Fédération artistique, mars 1887, p. 180 ; DE MONT, 1902,
p. 220 ; VANZYPE, n. d., p. 47 ; FREDERIC G., n°126.
Bibliographie :
DE BUCK, 1996-97, p. 66 ; Musée Courbet, 2018, p.154-155.
Notice :
L’oeuvre intitulée Trois Enfants d’ouvrier fait partie de ce que Gustave Vanzype nomme ces «
tableaux soumis à la vérité1 ». Dans un souci vériste d’observation, Léon Frederic représente ici dans
un arrangement vertical trois enfants d’âges différents. Une jeune fille blonde, les cheveux tenus par
un serre-tête et vêtue d’une robe bleue avec un jupon vermillon, tient dans ses bras un bébé les yeux
clos par la fatigue. Derrière elle, légèrement tourné de trois quart vers le poêle installé dans le coin
haut à droite de la composition, se tient un jeune homme un peu plus âgé que la fillette, coiffé d’une
1 Gustave Vanzype, Léon Frederic. Etude, Bruges, non édité, 1942, p. 47.
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casquette. Par un effet de composition classique, le peintre dispose dans le coin inférieur gauche une
nature morte composée de pots et vasques, servant ainsi de repoussoir.
Léon Frederic délaisse ici ses sujets inspirés de la vie paysanne vécue à Nafraiture pour
retourner vers la représentation de la vie miséreuse des ouvriers. Le peintre choisit ici trois jeunes
enfants comme modèles. Leurs noms ont d’ailleurs été indiqués par l’artiste dans le tableau. Il
s’agirait de trois enfants prénommés Florent, Justine et Joseph, trois enfants de Bernard Scié, le
célèbre marchand de craie. Frederic était à cette époque encore proche de la famille Scié puisque
l’artiste peint en 1887 le portrait du père de famille. De plus, l’intérieur légèrement mansardé aux
murs bleutés sur lequel se détachent les trois figures n’est pas s’en rappeler l’oeuvre La Mansarde du
marchand de craie dans laquelle Frederic a peint la famille chez eux dans leur quotidien. La volonté
de l’artiste réside dans le souci de vraisemblance et de vérité qui se dégage de cette scène. Frederic
reste obsédé par le rendu fidèle des physionomies procédant d’un réalisme sans fard. L’atmosphère
de l’oeuvre est troublante. L’intérieur modeste de cette famille d’ouvrier et les regards vagues des
enfants renforcent le malaise du spectateur face à la condition défavorisée de ces nécessiteux. L’artiste
manifeste une nouvelle fois une véritable empathie face à la misère humaine et aux conséquences du
paupérisme touchant les grandes villes industrielles.
Exposée pour la première fois au XIIIe Salon du Cercle littéraire et artistique de Bruxelles
dont le niveau était d’après le critique de L’Art moderne très en deçà des attentes modernistes, Trois
Enfants d’ouvrier apparait comme l’oeuvre la plus digne d’intérêt, même si l’observateur regrette «
une peinture noire, fumeuse et triste, commune d’aspect, dans laquelle se confine le jeune artiste, et
malgré tout attirante2. » Le tableau s’accordait alors avec la théorisation de l’art social élaborée par
Edmond Picard au sein même de la revue depuis le début des années 1880.